Abelag Aviation célèbre ses 50 ans (2/3)

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Le Cessna Pilot Center
Bruxelles, 8 mai 2014. Bien qu’intéressée principalement par le haut de la gamme Cessna, à l’époque des bimoteurs piston pressurisés et non-pressurisés, Abelag doit contractuellement également vendre des monomoteurs. Et Cessna a une idée géniale: pour vendre plus d’avions de sa marque, le constructeur de Wichita oblige ses dealers à opérer une école de pilotage Cessna Pilot Center. La firme inaugure donc en 1975 son Cessna Pilot Center, avec un Cessna F150M (OO-CNA), opéré d’abord au départ de Bruxelles-National, puis transféré en 1977 vers l’aérodrome de Grimbergen où un superbe club-house et un hangar sont construits en 1979 près de l’Ecole d’Aviation Civile (EAC).

Photographié en 1991 devant le hangar Abelag de Grimbergen, le Cessna F152 OO-HFA de l’école de pilotage Cessna Pilot Center.

Pour attirer une nouvelle clientèle à l’aviation, Abelag lance plusieurs initiatives novatrices au point de vue marketing: exposition d’avions aux salons des Vacances, du Sport et des Loisirs (avec atterrissage sur les parkings du plateau du Heysel, après agréation comme aérodrome provisoire, ce qui permet d’éviter le démontage des appareils; campagnes publicitaires sur les ondes des premières radios FM; publicité dans les journaux « toutes boîtes »; organisation d’événements au chalet et au hangar de l’école. Dès 1976, la formation IFR est également proposée, avec un link-trainer, et le Cessna 182B OO-CPW des débuts, bientôt remplacé par le Cessna F182P OO-CNG. En 1981, Abelag prend en charge la formation de pilotes pour la compagnie aérienne Tunis Air, et par la suite également pour divers autres opérateurs étrangers, notamment congolais.

En 1981, Abelag prend en charge la formation de pilotes pour la compagnie aérienne Tunis Air qui dispose d’un bimoteur Cessna 414 (TS-DMH).

Grâce aux bonnes relations de Christian Tarin, moniteur à l’école, le Cessna 210 OO-CNJ est régulièrement loué comme avion de support à différentes équipes des rallyes Paris-Dakar. En 1992, le gouvernement de la région Flamande décide de fermer l’aérodrome de Grimbergen. Après 17 années d’existence, et la formation de près de mille pilotes privés, Abelag cède son activité d’écolage à Abatros Air Academy, créée par Pierre Schoemans et son équipe, précédemment employé au CPC.

Impact des ventes
Le contrat avec Cessna est renouvelable d’année en année, et sera à l’origine d’une grave crise financière pour Abelag. Les exigences de plus en plus importantes en matière de quota pour rester dealer, et la nomination à un moment de basse conjoncture économique de pas moins de cinq représentants pour la Belgique, pénalisera la trésorerie de l’entreprise au début des années quatre-vingt, avec un stock d’avions invendus conséquent et un marché saturé aux prix bradés. Parallèlement, aux Etats-Unis les règlementations en matière de product liability entraînent des charges d’assurances gigantesques par rapport au prix d’un monomoteur, et Cessna abandonnera la fabrication d’avions à moteur à piston à partir du milieu des années quatre-vingt (et ne les reprendra de façon plus limitée qu’à la fin des années nonante).

La première vente d’un jet d’affaires immatriculé belge par Abelag: le Learjet 35A OO-KJG est livré en février 1978.

Au total, Abelag a vendu plus de 250 avions, dont de nombreux Cessna, mais aussi les premiers Learjet et par la suite divers types de jets d’affaires, tant neufs que de seconde main, en tant que dealer ou broker. Après un premier Lear 25 (OO-LFW) vendu en dehors de la Belgique, le premier Lear 35 neuf, le OO-LFX, est vendu à un client allemand en 1977. Le marché belge n’est pas mûr pour ce genre d’avions à l’époque, et Abelag fait preuve d’audace pour s’attaquer à des marchés plus éloignés. C’est ainsi que, bravant les risques de la guerre civile au Liban, André Ganshof part démontrer le Lear 35 à Beyrouth. Le client libanais apprécie le geste et achète en 1978 un Learjet 35A qu’il fait immatriculer en Belgique (OO-KJG.) La première vente d’un jet d’affaires à une entreprise belge est réalisée en 1983 lorsque le Groupe Bruxelles Lambert fait l’acquisition du Learjet 35A OO-GBL. Suivront par la suite plusieurs grands noms d’entreprises belges, dont d’Ieteren en 1987 (Learjet 25D OO-LFR), Amylum, Sidmar, etc.

En 1983 mise en service du Learjet 35A OO-GBL, premier jet d’affaires vendu à une grande entreprise belge (le Groupe Bruxelles Lambert), et qui fait l’objet d’un contrat de management par Abelag.

L’activité de vente était hautement cyclique, tributaire des aléas de la conjoncture économique, du taux de change du dollar, et d’autres éléments. Des achats spéculatifs pouvaient se révéler très rentables ou entraîner des pertes. Acheter une position sur la future chaîne de production d’un avion en développement garantissait un prix d’introduction attractif et une early delivery, mais sans pouvoir anticiper l’état du marché futur. Participer au lancement de nouveaux programmes était risqué, mais une de ces opérations a à l’époque sauvé l’entreprise. Admirateur de Bill Lear, l’inventeur du Learjet, André Ganshof van der Meersch lui passe commande d’un Canadair Challenger, que le génial ingénieur américain développait pour le constructeur canadien. Le développement d’un nouvel avion s’étale sur plusieurs années, et l’avion est proche de la livraison à un moment où les affaires d’Abelag ne sont pas au beau fixe. La revente de la position Challenger à REGA-Swiss Air Rescue (spécialisée dans les vols-ambulance) sauvera l’entreprise grâce à la plus-value réalisée entre le prix de lancement et le prix de vente inspiré de celui affiché par le constructeur peu avant la livraison. Quelques autres opérations se révéleront moins heureuse, et certains avions commandés seront annulés avant leur livraison, la situation économique ayant évolué de façon trop défavorable entre la commande de lancement d’un nouveau modèle et son arrivée sur le marché quelques années plus tard. Ce fut le cas notamment pour un Cessna 425 Corsair (OO-LFC), et un CitationJet (OO-LFU).

Certains avions commandés seront annulés avant leur livraison, la situation économique ayant évolué de façon trop défavorable entre la commande de lancement d’un nouveau modèle et son arrivée sur le marché quelques années plus tard. Ce fut le cas notamment en 1992 de ce Cessna 425 Corsair (OO-LFC).

Au niveau des Citation, le constructeur américain choisit d’organiser lui-même ses ventes, sans passer par des dealers. Abelag se rattrape en développant une expertise en matière de ventes de biréacteurs de seconde-main. En fonction des besoins des clients potentiels, on évalue le marché et pré-sélectionne sur fiche technique quelques avions correspondants au budget du client, et on part inspecter les avions retenus avec une équipe composée d’un pilote, d’un technicien et d’un commercial. Cette formule permettra de nombreuses ventes sans restrictions de marques et sans les contraintes d’un dealership.

Le taxi aérien
Les débuts du taxi aérien en Belgique ont été difficiles. Il fallait convaincre une clientèle des bénéfices de ce mode de transport, qui permet en choisissant son horaire de desservir plus de 2.000 destinations en direct depuis la Belgique, de gagner du temps, et de travailler en toute discrétion dans une cabine confortable. Mais il faut rassurer le client qui a un peu peur de voler en « petit avion »…Et les premiers clients sont surtout les compagnies américaines ayant installé leur siège européen en Belgique, car ils sont plus familiers du concept largement utilisé aux USA. Un des premiers contrats importants est conclu avec Esso Chemicals, qui confie à Abelag Aviation l’opération d’un corporate shuttle à jour et horaire fixe pour transporter son personnel entre son siège de Diegem et ses installations du Havre (France.) D’autres suivront et avec le temps la proportion d’entreprises belges clientes augmentera.

La clientèle taxi aérien évolue et demande des machines plus confortables et plus rapides que les avions à piston. En 1974, pas moins de cinq bimoteurs à piston sont en service, et seulement deux jets. Quelques années plus tard on assiste au déclin et au retrait des pistons, à l’arrivée des premiers turbopropulseurs et à l’accroissement de la flotte de jets.

Un record du monde
Et le passage au turboprop se fait de façon éclatante. Après quelques retards de mise au point par le constructeur, le premier Cessna 441 Conquest, le OO-LFJ, bat un record du monde de distance (homologué par la Fédération Aéronautique Internationale), piloté par André Ganshof van der Meersch et Francis van Cutsem, en traversant l’Atlantique sans escale de Gander (Canada) à Bruxelles le 21 mai 1978, soit une distance de 4.115 km! Ils démontrent ainsi les qualités en matière d’économie de carburant et de performance des turbopropulseurs.

Le Cessna 441 Conquest OO-LFJ bat un record du monde de distance lors de son vol de livraison en mai 1978 en effectuant sans escale et sans réservoirs supplémentaires la traversée de Gander à Bruxelles (4.115 km)! André Ganshof van der Meersch et Francis van Cutsem démontre ainsi les qualités intrinsèques du biturbopropulseur d’affaires.

Le deuxième Conquest (OO-LFL) sera livré en 1980. 1979 voit l’arrivée du premier Learjet 35A (OO-LFY), équipé de turbofan nettement plus économique et moins bruyant que les straight jets des Lear 24 et 25. D’autres machines du même type remplaceront progressivement les Lear de la première génération. La récession du début des années quatre-vingt pénalise fortement Abelag. Une grande partie de la flotte de bimoteurs à piston est vendue, et malheureusement l’entreprise doit procéder à une réduction drastique de son personnel.

Les vols médicaux
Un autre segment permet de faire voler les avions: les évacuations sanitaires. Des sociétés d’assurance se spécialisent dans ce domaine et proposent le rapatriement par avion en cas d’accident à l’étranger. Abelag Aviation se spécialise dans ce créneau et vole pour les principaux acteurs du secteur (Europassistance, Mondial-Assistance, Touring, VAB-VTB, etc.) Quelques années plus tard, ce seront les vols de transport d’organes qui permettront une généralisation des transplantations à l’échelle européenne, grâce à la centralisation des données médicales du réseau Eurotransplant et à la vitesse de réaction d’Abelag, permettant le décollage une heure et demie après la demande de vol, et ce 24 heures sur 24. Bien des vies ont ainsi pu être sauvées grâce à la vitesse des jets d’affaires et à la rapidité de réaction des opérations Abelag.

Abelag se spécialise très vite dans les vols médicaux. Ici, en 1983, un rapatriement sanitaire en Cessna 421C OO-LFH pressurisé pour le compte de Touring Assistance. La patient est transféré à l’abri du hangar de l’avion à l’ambulance.

Lors du décès du Roi Baudouin en juillet 1993, Abelag est contacté en pleine nuit et organise rapidement un vol pour transporter le premier Ministre Jean-Luc Dehaene vers l’Espagne et l’en ramener après consultations avec la famille Royale pour prendre les décisions relatives à la succession lors d’un Conseil des Ministres extraordinaire, le tout se déroulant en moins d’une journée grâce à la rapidité du Learjet 35A. Autre diversification: pendant plusieurs années, Abelag opère un Learjet pour le compte de la Marine Royale Hollandaise pour simuler un avion hostile (comme les Argentins l’ont fait avec succès lors de la guerre des Malouines) et « attaquer » les navires de guerre pour permettre l’entraînement des radaristes d’interception à bord de ceux-ci. Ces missions sont particulièrement appréciées des pilotes.

Aircraft management
Une nouvelle formule est inaugurée: on propose un avion d’affaires à la vente à une entreprise, et on lui rachète des heures de vol pour l’aider à arriver à une utilisation qui permet de réduire le coût à l’heure. L’aviation étant un métier spécialisé qui requiert l’expérience dans de nombreux domaines (pilotes, entretien, hangar, gestion opérationnelle), on lui propose un contrat de management qui permet d’offrir tous ces services à la carte. Louer un équipage sélectionné et formé par Abelag coûte moins cher que d’engager ses propres pilotes et assure une disponibilité beaucoup plus grande. Les conditions d’assurance dans le cadre d’une flotte sont plus attractives. Et la fourniture d’avions de remplacement lors d’immobilisations techniques se fait à des conditions préférentielles.

Photographié en vol en 1989 peu après sa livraison, le Falcon 50 OO-LFT est le premier jet d’affaires intercontinental opéré en Belgique. Il effectuera peu après le premier tour du monde d’un avion belge.

En 1983, le Groupe Bruxelles Lambert fait l’acquisition via Abelag d’un Learjet 35A (OO-GBL) et signe le premier contrat de management d’avion en Belgique. Albert Frère est depuis un client fidèle d’Abelag, lui confiant en 1989 l’acquisition et le contrat de management du premier jet d’affaires intercontinental en Belgique, le Dassault Falcon 50 (OO-LFT), qui sera suivi par après par du Falcon 2000. L’arrivée du Falcon 50 propulse Abelag dans le cercle à l’époque très restreint des opérateurs de jets permettant de voler sans escale sur de longues distances.Et un des premiers vols commerciaux du nouvel avion consiste à effectuer le premier tour du monde (dans le sens est-ouest) réalisé par un avion belge, avec le chef-pilote de l’époque, Yves Dardenne, aux commandes.

Evolution de la flotte
A son trentième anniversaire (1994) Abelag dispose d’une flotte entièrement composée d’avions à turbine: le seul jet d’affaires intercontinental en Belgique, le Dassault Falcon 50 OO-LFT, cinq biréacteurs Learjet (dont trois en propriété) et deux biturbopropulseurs Cessna 441 Conquest. En 1995 la société Lambda Jet est intégrée et permet la mise en service de deux Cessna 500 Citation (OO-LCM et OO-DCM), rendant l’accès au jet plus abordable.

La flotte Abelag en 1990 est constituée de trois catégories d’avions: le biturbopropulseur Cessna 441 Conquest (OO-LFJ et OO-LFL), cinq biréacteurs Learjet (OO-LFA, OO-LFR, OO-LFV, OO-LFY et OO-GBL) et le triréacteur Dassault Falcon 50 OO-LFT.

1999 voit l’arrivée du premier Learjet 45 (OO-LFS), un biréacteur mid-size jet qui crée une nouvelle catégorie de confort avec un aménagement de deux fois quatre sièges en face à face. Il sera suivi de deux autres exemplaires, le OO-LFN en 2004 et le OO-EPU en 2006. Son concurrent, le Cessna Citation Excel, rejoint également la flotte, avec la mise en exploitation de plusieurs avions de clients: le OO-MLG en 1999, le OO-PGG en 2002, le OO-FTS en 2004, le OO-AIE en 2007, le OO-SLM en 2008 et le OO-CEH en 2009.

Le premier Learjet 45 (OO-LFS) est introduit dans la flotte en 1999. Il offre à la clientèle une cabine particulièrement confortable. Trois exemplaires seront exploités par Abelag.

Le mariage avec Sky Service fin 2000 ramène le turboprop dans la flotte, avec plusieurs Beech King Air, dont deux exemplaires sont toujours en service en 2014 (OO-INN et OO-LAC), ce dernier étant aménagé en version ambulance et commercialisé sous la marque Sky Lifeguard depuis 2006. Et l’influence Cessna se traduit aussi par l’arrivée de plusieurs Citation de différents modèles provenant de Sky Service. Ils seront progressivement remplacés par la nouvelle génération des CitationJet: en 2004 les CJ2 OO-DDA, OO-CIV, et OO-SKY, bientôt suivis des CJ3 OO-LIE et OO-FYS en 2007.

Mentionnons pour être complet de 2010 à 2012  le bref passage dans la flotte de plusieurs Embraer 500 Phenom 100 de propriétaires (OO-MCV, OO-MAS, OO-OTU.)

Abelag exploitera brièvement, de 2010 à 2012, jusqu’à trois light jets Embraer Phenom 100. Ici, les OO-MCV et OO-MAS lors de leur présentation chez Abelag Antwerp en novembre 2010.

Mais c’est surtout le haut de gamme qui impressionne. Le Falcon 50 OO-LFT est remplacé après 11 années par un premier Falcon 2000 (OO-GFD) qui volera de 2000 à 2008. Il sera rejoint à partir de 2007 par plusieurs autres appareils du même type: OO-GML et OO-OFP en 2007; OO-DFG en 2008; OO-GHE, OO-VRO et OO-FDG en 2013. Et en 2011 l’arrivée du premier Falcon 7X (OO-EJA), suivi du OO-LMG en 2012.

Dans les années 2000, avec désormais une vingtaine d’avions en opération, Abelag Aviation devient l’un des plus grand exploitant d’avions d’affaires en Europe. Et depuis son intégration dans Luxaviation en juin 2013, fait désormais partie d’un groupe de dimension européenne comprenant pas moins de 90 avions d’affaires à turbine par l’addition des flottes d’Abelag, mais aussi de Flairjet en Allemagne, London Executive en Angleterre, Luxaviation à Luxembourg et Unijet en France.

Fleuron de la flotte Abelag, le premier Falcon 7X (OO-EJA) est introduit en 2011. Il est photographié en septembre 2012 avec le Falcon 2000 (OO-DFG) devant le hangar 28.

Texte et photos Guy Viselé

Guy Viselé

Guy Viselé

Pilote privé et Lieutenant-Colonel de Réserve de la Force Aérienne Belge, mais avant tout passionné d'aviation, il débute sa carrière chez Publi Air. Il passe ensuite vingt ans chez Abelag Aviation où il termine comme Executive Vice-President. Après dix ans comme porte-parole de Belgocontrol, il devient consultant pour l’EBAA (European Business Aviation Association). Journaliste free-lance depuis toujours, il a collaboré à la plupart des revues d'aviation belges, et a rejoint Hangar Flying en 2010.

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