Anvers fête le 75ème anniversaire de la libération

Le côté droit du bombardier est décoré de la pin-up Memphis Belle, comme sur la première forteresse volante qui effectua un tour d’opérations complet et repartit telle quelle en tournée de propagande en Amérique en 1943.

Deurne, le 8 septembre 2019. Après la parade nautique et aéronautique de la veille sur l’Escaut, ce dimanche est dédié au meeting aérien de la libération sur l’aérodrome de Deurne.

D’emblée, on est mis dans l’ambiance, les haut-parleurs diffusent du Glenn Miller et des chansons des Andrew Sisters… nous voilà plongés dans la nostalgie de la libération, d’autant plus qu’il y a une belle brochette de warbirds et d’avions anciens sur le tarmac. Ils vont bientôt prendre leur envol, rejoints par d’autres avions venus de leur port d’attache pour le plus grand plaisir du public (évalué à 17.000 personnes) mais aussi des spotters et amateurs d’avions historiques qui ont connu d’âpres moments durant la Seconde Guerre Mondiale et dont seuls quelques exemplaires (sinon un seul) de leur espèce demeurent en état de vol. La présence d’un Bristol Blenheim MK I, exemplaire volant très rare, car seul survivant de son espèce. Cet appareil a comblé les fanas d’aviation, de même que le seul Boeing B-17G Flying Fortress encore en état de vol en Europe. Celui-ci était l’un des mythiques B-17 qui tinrent la vedette dans le film « Memphis Belle » réalisé par la Warner Brothers et qui passa sur les écrans européens dès janvier 1991. Mais le plateau des warbirds était bien garni avec encore un très rare Hawker Hurricane MK IV dont la présentation fut magistrale, un Spitfire MK IX de l’escadrille historique de la KLu néerlandaise, l’unique exemplaire du CAC Boomerang australien volant dans notre hémisphère ainsi qu’un Yak 3U.

Le seul Bristol Blenheim qui vole encore dans le monde est du type MK I, précédemment du type MK IV avec nez allongé, accidenté et reconstruit comme MK I avec un nez en forme de bec de lièvre. Celui-ci est piloté par John Romain, l’un des meilleurs pilotes et restaurateurs de warbirds au monde; il porte le code YP-Q du squadron 23 de chasse de nuit et est immatriculé L6739. (Photo : Kevin Cleynhens)
La grosse pièce au menu du meeting de Deurne était incontestable le seul Boeing B-17G Flying Fortress en état de vol en Europe. Il porte une livrée « olive drab » (vert olive) typique des avions de l’US Army Air Force de la 2ème guerre mondiale. Initialement, cet imposant avion avait un fini métallique et une pin-up dite Sally B qui est demeurée après peinture pour les prises de vues du film « Memphis Belle » par la Warner Brothers en 1990. Le B-17 du filme était une version différant de la G par les tourelles de menton et ventrale présentes sur le B-17G actuel. (Photo : Kevin Cleynhens)
Le côté droit du bombardier est décoré de la pin-up Memphis Belle, comme sur la première forteresse volante qui effectua un tour d’opérations complet et repartit telle quelle en tournée de propagande en Amérique en 1943.
Vedette du meeting, le Hawker Hurricane MK IV acquis en 2018 a reçu l’immatriculation belge OO-HUR. Cet appareil d’exception, il n’en reste effectivement que très peu en état de vol, constituait le gros des chasseurs anglais lors de la Bataille d’Angleterre en 1940. Celui-ci, piloté avec maestria par son propriétaire Bernard Van Milders, est revêtu du camouflage type « desert » et ses marques JV-N indiquent l’appartenance au squadron 6 lorsqu’il était basé au Caire en 1941/1942. (Photo : Kevin Cleynhens)
Bernard Van Milders bascule le Hurricane dans un virage sur la tranche, révélant ainsi le camouflage bleu azur appliqué sur les surfaces inférieures des avions combattant l’Afrika Korps allemand de 1941 à 1943.
Le Spitfire britannique attendu ayant déclaré forfait suite à un accident récent à Midden-Zeeland, le pilote néerlandais de la KLu a assuré la relève avec le Spitfire MK IX du flight historique de la KLu. Il est immatriculé 3W-17, révélant son appartenance au squadron 322.
Seul exemplaire du CAC Boomerang australien en Europe, celui-ci était immatriculé A46-139 à la Royal Australian Air Force et porte actuellement l’immatriculation civile américaine NX32CS. Son pilote et propriétaire, Remko Sijben, possède également d’autres avions historiques. (Photo : Kevin Cleynhens)
Rick Van Der Graaf, pilote du Yak 3U immatriculé F-AZZK (F pour France et AZ pour avion de collection) est aussi le CEO (Chief Executive Officer) de l’air park (village aéronautique destiné aux aviateurs et avions) de Cahors en France. (Photo : Kevin Cleynhens)

Côté vintage, il y avait le North American T-6G Texan basé à Deurne et aussi l’élégant Lockheed 12 Electra basé à Genk et récemment arrivé en Belgique et dont c’était la seconde apparition à Deurne. Ce bel avion de ligne, dont la conception remonte à 1936, était une version plus petite extrapolée du Lockheed 10, l’appareil avec lequel la célèbre aviatrice américaine Amelia Earhart disparut au-dessus de l’océan Pacifique en juillet 1937.

Appareil classique et emblématique des années 30, le Lockheed 12 Electra Junior, version réduite du modèle 10. Le Lockheed Electra 12 aux lignes classiques et au son tout autant classique émis par ses deux moteurs Pratt & Whitney Wasp Junior de 450 CV. Un seul Electra 12 fut immatriculé en Belgique, à savoir OO-AFA par le baron du textile et aviateur chevronné Georges Hanet en juin 1947; il le remplaça par un Cessna UC-78 Bobcat en mars 1948. (Photo : Kevin Cleynhens)

Les spectateurs furent encore gratifiés d’une « balbo » de biplans SV4 vétérans. La qualification balbo fait référence au maréchal italien Italo Balbo qui mena de nombreux raids de plus de dix avions volant en formation en pagaille dans l’entre-deux-guerres. L’expression « flying a balbo » fut inventée par le Tiger Club britannique qui faisait voler des balbo de Tiger Moth et autres Druine Turbulent lors de fêtes aériennes au Royaume-Uni dans les années 50 et 60 du siècle dernier.

La formation des SV4 se composait comme suit :

  • Trio leader : OO-GWC leader piloté par Danny Cabooter, à sa gauche : OO-EIR/V4 piloté par André Maes et à sa droite : OO-MON/V30 avec Guy Van Eeckhoudt aux commandes.
  • Trio formant l’aile gauche de la formation : G-AIYG avec Ewout Henny aux commandes avec à sa gauche : OO-BPL piloté par Bart Cluytens et à sa droite : OO-KAT avec Frank De Meyer dans le cockpit.
  • Trio formant l’aile droite de la formation : OO-WIL/V42 piloté par Tim Cuypers, le fils de Raymond avec, à sa gauche : D-EBVV/V58 avec Christian Gubel aux commandes et à sa droite le F-PCOR piloté par Raymond Cuypers.
La balbo de neuf Stampe & Vertongen SV4 menée par Danny Cabooter, président du Stampe Museum remémorant la construction de nombreux avions SV et RSV avant la dernière guerre dans des ateliers établis en bordure de l’actuel aérodrome de Deurne.
Retour au paddock du Stampe SV4 immatriculé OO-GWC avec Danny Cabooter aux commandes; c’est le plus vieux Stampe parmi ceux volant encore.

Bien que l’entrée au meeting était gratuite, on peut franchement dire que le public en a eu pour plus que ses sous, selon l’expression consacrée. Le ciel de Deurne fut en effet égayé par la superbe démonstration de notre patrouille des Diables Rouges dont les évolutions acrobatiques demeurent un réel enchantement. Les spectateurs eurent encore droit à une très belle présentation du Fouga CM170.R Magister aux couleurs des Diables Rouges qui volèrent sur ce type d’appareil de 1965 à 1977 ainsi que d’un North American T-28 Trojan.

Le Fouga CM170.R Magister, ex Force Aérienne Belge et patrouille des Diables Rouges en 1977, est piloté par Bernard Van Milders pour une présentation démontrant bien l’agilité de cet avion école biréacteur.
A l’issue d’une démonstration bien cadencée, Bernard Van Milders salue le public qui l’applaudit alors qu’il roule vers le tarmac.
Les Diables Rouges retournent à la maison, celui immatriculé ST-34 est piloté par Alain « Papy » Collard qui bascule ses ailes en guise d’au revoir. La dérive du SIAI-Marchetti SF260 a été peinte en noir pour célébrer les 50 ans de la mise en service du SF260 à la Force Aérienne Belge.
Le North American T-28 Trojan était un appareil d’entraînement mis en service à l’USAF au début des années 50. Celui-ci, immatriculé 55-138304 chez les militaires (et N13288 chez les civils) est piloté par son propriétaire Luc Hellings qui le base à l’aérodrome de Genk-Zwartberg.

Comme l’aérodrome est demeuré opérationnel durant toute la durée du meeting, il fut possible d’observer les nombreux atterrissages et décollages des avions de ligne Embraer 190 de TUI.

Décollage de l’un des nombreux Embraer 190 de TUI; celui-ci est immatriculé OO-TEA et amène quelque deux cents passagers à leur destination de vacances.

Le Lockheed C-130H Hercules CH-11 de la 20ème escadrille du 15ème wing de Melsbroek demeura sur le tarmac toute la journée et était porteur de bandes d’invasion et de la mention « Tribute to 525 squadron » pour commémorer le 75ème anniversaire du débarquement de juin 1944 en Normandie; le squadron 525 était une escadrille de transport de la Royal Air Force où de nombreux pilotes belges furent mutés de 1944 à 1946. Ceux-ci se préparaient ainsi à rejoindre, après la cessation des hostilités, l’aviation de transport militaire autant que civile et, plus particulièrement, la Sabena.

Le Lockheed C-130H Hercules du 15ème wing porte les fameuses bandes d’invasion appliquées aux avions participant aux opérations du débarquement en Normandie de 1944, dont on célèbre cette année le 75ème anniversaire. Cet appareil porte, près de sa porte arrière droite, la mention « Tribute to 525 squadron.

La fête aérienne finit en apothéose avec la formation des Victors sur Piper Cherokee qui fêtent cette année leurs quinze ans de prestations de grande qualité, sachant que les pilotes sont issus de l’aéro-club d’Ursel. Le meeting se clôtura par le saut à ouverture retardée de six parachutistes du Skydive Antwerp basé à Hoevenen.

Décollage en formation des Victors, une patrouille de Piper Cherokee affiliée à l’aéro-club d’Ursel et qui fête son 15ème anniversaire cette année.
Break spectaculaire exécuté par les Victors à l’issue de leur présentation.

Une très belle fête des ailes comme on en voit peu, organisée de main de maître par Danny Cabooter et les instances aéroportuaires ainsi que de nombreux bénévoles qu’il nous plait de saluer et remercier ici. L’événement fut un vrai ravissement pour les amateurs d’aviation, tant il est vrai que les derniers meetings de warbirds en Belgique remontent au milieu des années 90 du siècle dernier.

Jean-Pierre Decock
Photos: Jean-Pierre Decock & Kevin Cleynhens

Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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