Vol en Sonaca 200

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Gosselies, le 30 août 2016, sur le tarmac avec Pierre Van Wetter, comme je m’approche du Sonaca 200 rutilant de toute sa livrée aluminium sous le généreux soleil de cette fin d’été, il me vient immédiatement à l’esprit l’adage de Sir Sydney Camm, le génial concepteur des chasseurs Typhoon, Tempest et Hunter, qui prétendait qu’un bel avion vole toujours bien. C’est ce que nous n’allons pas tarder à vérifier. Pierre Van Wetter est le promoteur et le manager de la SONACA Aircraft, la nouvelle filiale de la SONACA fondée par lui-même et ses partenaires Sophie Lancereau et Carl Mengdehl.

Le Sonaca 200 immatriculé opportunément OO-SON au taxi à Gosselies avec Pierre Van Wetter aux commandes.

Nous marchons vers l’appareil opportunément immatriculé OO-SON, lequel a, en fait, été construit en Afrique du Sud par The Airplane Factory. Convoyé en vol vers la Belgique fin 2015, la nouvelle filiale Sonaca Aircraft, en accord complet avec le concepteur sud-africain initial, a entamé de profondes modifications pour métamorphoser le Sling 2 en Sonaca 200, un appareil très différent et prototype de la série dont la construction devrait être lancée en 2017 pour livraison du premier appareil dès septembre après obtention des certifications européennes EASA.

L’auteur assiste au contrôle pré-vol effectué par le pilote du Sonaca 200 sur fond de tour de contrôle de Gosselies.

En faisant le tour de l’avion
Nous nous apprêtons, avec Pierre Van Wetter qui en est le pilote, à effectuer la visite pré-vol de ce superbe petit avion aux lignes assurément racées et aux allures de ce qu’on appelait « un bon zinc » pour les avions métalliques classiques. En effet, les panneaux d’aluminium rivetés induisent la robustesse de l’appareil.

Discussion au sujet des pales en matériau synthétique de l’hélice à pas variable du Sonaca 200 entraînée par un moteur Rotax 914F de 115CV.

Nous commençons par le bord d’attaque de l’aile gauche et Pierre Van Wetter m’explique le système de réservoirs d’ailes de 2 x 70 litres positionnés dans le bord d’attaque de l’aile, en avant du longeron principal. L’emport d’une quantité de 140 litres de carburant pour une consommation de 18 litres/heure permet une autonomie de près de 8 heures de vol, soit de couvrir une distance d’environ 1.500 kilomètres au régime de croisière; cela en fait donc un avion pour le voyage à longue distance en comparaison aux biplaces actuellement sur le marché dont l’autonomie est généralement de moitié en comparaison à celle du Sonaca 200.

Passant derrière l’aile, le pilote me fait remarquer la surface des ailerons et le bout d’aile façon winglet pour empêcher ou retarder le décrochage en bouts d’ailes. Les volets à fente (slot) commandés électriquement courent de l’aileron jusqu’au congé d’aile ; leur grande surface et les slots offrent donc un rendement optimal des volets en matière de sustentation de l’appareil ainsi qu’un effet aérofrein non négligeable. Nous poursuivons notre external check et nous arrêtons, après avoir vérifié le niveau d’huile du moteur Rotax, sur l’hélice tripale en matériau composite qui, pour des raisons d’économie et de simplification, ne sera plus à pas variable (constant speed) mais à pas fixe sur les modèles de série.

Installés à bord, moteur chauffant avant de taxier pour le vol d’essai; à gauche, l’auteur, à droite Pierre Van Wetter, le promoteur du projet Sonaca 200.

Coup d’œil sur le train d’atterrissage tricycle en fibres de verre et question en ce qui concerne la trappe de visite (à côté d’un grand autocollant « warning ») positionnée en avant du pare-brise de l’avion, sur le côté gauche du nez… Le pilote m’informe qu’il s’agit du logement du parachute de sauvetage de l’appareil installé en série sur les Sling en Afrique du Sud; ce dispositif sera cependant absent des Sonaca 200 de série pour des raisons de gain de poids, mais surtout d’évitement de maintenance complexe, répétitive et onéreuse du parachute de secours surtout utile dans des conditions extrêmes et, partant, fort rares. C’est décidément une fort belle machine volante et nous y embarquons afin de vérifier, par nous-mêmes, l’affirmation de Sir Sydney Camm…

Le petit Sonaca 200 au point d’attente S4 formera bientôt les pilotes de gros Boeing 737 comme celui-ci appartenant à la compagnie Ryanair à l’atterrissage à Brussels South Charleroi Airport.

En vol
Pierre Van Wetter et moi-même nous installons dans l’habitacle spacieux et confortable du Sonaca 200. Le moteur démarre au quart de tour. Contrôle rapide du tableau de bord à la fois numérique avec son écran Garmin et analogique (indicateur de vitesse, horizon artificiel et altimètre) et nous voilà au roulage vers le point d’attente de la bretelle S4 d’accès à la piste 25. Ultimes contrôles moteur et nous sommes autorisés à nous aligner et à décoller, le QNH (pression barométrique au niveau moyen de la mer) est de 1027 mb, le vent modéré de huit nœuds souffle du 230 et est donc bien dans l’axe de piste. Pierre Van Wetter pousse la manette des gaz à fond, l’avion s’ébranle et décolle en un peu plus de deux cents mètres. La montée se fait franchement, à pratiquement 250 mètres/minute. Dégagement à droite et nous ne tardons pas à sortir de la zone de contrôle de Charleroi et mettons le cap à l’ouest vers le plan incliné de Ronquières que nous apercevons déjà, car la visibilité est quasi illimitée. Le Sonaca 200 est remarquablement stable, un comportement en vol pour ainsi dire idéal. L’appareil affiche un bon 100 nœuds (185 km/h) au badin et vole pratiquement tout seul vers la tour imposante de Ronquières. Pierre Van Wetter me cède les commandes et je suis positivement surpris par leur précision et les faibles amplitudes du manche à balai et des palonniers pour effectuer un large virage autour de la tour du plan incliné; le zinc garde impeccablement son attitude de vol sans nécessiter de correction, on croirait presqu’être en pilotage automatique. Nous mettons ensuite le cap sur la butte du Lion de Waterloo et prenons un peu d’altitude pour effectuer quelques pertes de sustentation. Le pilote en entame une en configuration lisse et l’appareil décroche franchement à 60 nœuds en maintenant bien ses ailes à l’horizontale et pique pour reprendre de la vitesse. Rebelote, mais cette fois avec volets sortis au maximum : le pilote coupe les gaz, lève le nez de l’avion qui prend une attitude très cabrée avant de décrocher sec, sans le moindre buffeting (secousses) à 42 nœuds pour piquer à fond et puis reprendre docilement sas ligne de vol normale. En tous cas, avec le Sonaca 200, les élèves pilotes sauront pertinemment bien ce qu’est un décrochage ou une perte de vitesse…

Le tableau de bord du Sonaca 200 avec écran Garmin et instruments analogiques de base (badin, horizon artificiel et altimètre). La poignée rouge en bas au centre est celle qui commande l’ouverture du parachute de sauvetage de l’avion : ce dispositif ne sera pas monté dans les appareils de série.
Pierre Van Wetter, promoteur du Sonaca 200 et manager de Sonaca Aircraft visiblement heureux aux commandes de « son zinc ».
Virage 360° serré au-dessus des ruines de l’abbaye de Villers-la-Ville.

Nous nous portons vers les ruines de l’abbaye de Villers-la-Ville et en profitons pour faire un 360° à forte inclinaison et le Sonaca 200 maintient bien le défilement de son nez sur l’horizon sans avoir à donner de petits coups d’aileron pour maintenir la pente de l’appareil qui est d’une étonnante stabilité et d’une docilité des commandes comme j’en ai, personnellement, peu connues parmi les divers autres avions que j’ai été amené à piloter…

Mais le temps s’écoule et cela fait presque trois quarts d’heure que nous sommes en l’air et il faut songer à rentrer. De Villers-la-Ville on est à deux ou trois coups d’aile de l’aérodrome de Gosselies dont nous rejoignons bientôt, après une approche directe, l’étape de base du circuit droit de la piste 25 pour aligner le nez du Sonaca 200 sur la piste où nous nous posons en douceur sur quelques 300 mètres à l’issue d’un vol extrêmement enthousiasmant à bord d’un avion léger particulièrement réussi qui fera encore parler de lui dans un proche avenir !

En courte finale sur la piste 25 de Gosselies avec un Boeing 737 de Ryanair en attente au point N5.
Pierre Van Wetter et Jean-Pierre Decock visiblement satisfaits de vol en Sonaca 200 qui fut particulièrement enthousiasmant.

Du reste, une fois débarqués de l’appareil, Pierre Van Wetter confirme que son carnet de commandes porte déjà sur 22 Sonaca 200 (à fin septembre 2016), à savoir 8 pour chacune des deux grandes écoles de pilotage opérant à Gosselies (Air Academy/New CAG et Belgian Flight School) auxquels s’ajoutent 6 exemplaires commandés à l’étranger, à savoir chaque fois 2 appareils respectivement pour l’Aéro-Club Tissandier (France), la London Flight Training School et la Flugschule am Flughaffen Essen-Mülheim (Allemagne).

Le succès du Sonaca 200 est de toute évidence mérité et nous souhaitons à Pierre Van Wetter et à son équipe que le succès aille en croissant à pas de géant.

Jean-Pierre Decock
Photos de Guy Viselé et Jean-Pierre Decock

Pour infos complémentaires : voir l’article « L’avion de la Sonaca » par Guy Viselé paru sur ce site en octobre 2015.

Pour les aéro-clubs désirant une démonstration du Sonaca 200, contacter Pierre Van Wetter via www.sonaca-aircraft.com

 

FICHE TECHNIQUE DU SONACA 200

Caractéristiques
Envergure : 9,15 m / Longueur : 7 m / Hauteur estimée : 2,80 m.
Poids à vide : 430 kg / Poids maximum au décollage : 750 kg
Facteur de charge : +4,4 G

Propulseur
Un moteur BRP Rotax 914F développant 115 CV

Performances
Vitesse de croisière : 115 nœuds (215 km/h)
Vitesse ascensionnelle : 750 pieds/minute (225 m/minute)
Vitesse de décrochage : 60 nœuds (110 km/h) en configuration lisse et 40 nœuds (74 km/h) volets intégralement sortis
VNE (vitesse à ne jamais dépasser) : 145 nœuds (270 km/h)
Distance de décollage : 350 m
Distance d’atterrissage : environ 300 m

Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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