Parade des ailes belges

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Bruxelles, le 21 juillet 2010: une foule nombreuse était venue, comme chaque année, complimenter et applaudir l’armée belge. La tradition bien ancrée du défilé militaire devant le palais royal, tout aussi traditionnellement ouvert par le défilé aérien qui comptait 46 avions et hélicoptères cette année, a été respectée.

Les sillons noir-jaune-rouge tracés dans le ciel de Bruxelles par les Alphajet des 7ème et 11ème escadrilles du 1er wing dont la majeure partie est actuellement déployée à Cazaux en France dans le cadre des accords franco-belges en matière d’entraînement.
Le deuxième box de F-16 de Kleine-Brogel au sein duquel évoluent le F-16AM FA-87 du squadron 31 à la livrée tigrée appliquée à l’occasion du NATO Tiger Meet qui s’est déroulé à Kleine-Brogel en septembre dernier ainsi que le F-16BM (FB-18) décoré au faucon pour le 20ème anniversaire (en 2007) de la constitution de l’OCU F-16 (Operational Conversion Unit) en escadrille autonome; le faucon est une allusion directe au nom de « fighting falcon » qui a été attribué au F-16.

Echelonnés « au chausse-pied »
Faire défiler ponctuellement 46 appareils en 11 box de quatre ou trois avions ou hélicoptères se terminant par trois avions de transport à la file indienne, tous parfaitement positionnés sur le palais royal, n’est effectivement pas une sinécure. En effet, l’espacement de ces nombreux appareils aux vitesses très différentes relève quasiment du casse-tête et, même si le mécanisme est rôdé depuis des décennies, chaque défilé aérien annuel est un nouveau défi pour les organisateurs qui s’en tirent chaque fois avec dextérité et malgré une seule répétition de mise au point qui a lieu au-dessus de Bruxelles généralement dans les jours qui précèdent la fête nationale.

Le deuxième box de F-16AM (dont un BM) constitué par les 1ère et 350ème escadrilles du 2ème wing de Florennes.

Pour obtenir ce défilé aérien impeccable, les avions et hélicoptères décollent de leurs bases respectives selon un horaire et une cadence scrupuleux. Etant donné que les bases sont implantées aux quatre coins du royaume, les formations aériennes qui en proviennent sont astreintes à un cheminement prédéterminé qu’elles doivent rigoureusement suivre pour se positionner sur le bon cap, à l’altitude prescrite et pour ainsi dire dans le bon ordre à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de la capitale. C’est au cours de ce dernier tronçon que l’échelonnement exact du défilé s’établit et, jusqu’aux portes de l’agglomération bruxelloise, les appareils les plus rapides dépassent les plus lents volant plus bas et sur un cap identique.

Les SIAI Marchetti SF 260M, décorés spécialement fin juin 2010 pour la patrouille Hardship Red de la 5ème escadrille, représentaient l’avant-garde du 1er wing de Beauvechain.

Par exemple et parlant d’expériences vécues, les C-130H Hercules quadrimoteurs participants décollent de Zaventem pratiquement 1 heure 30 avant le défilé; en formation à trois assez lâche, ils mettent le cap au nord-ouest vers Rupelmonde puis infléchissent leur route vers Bruges. Le point tournant se situe à peu près à mi-route entre Bruges et Gand, au sud du port de cette même ville. C’est alors qu’ils resserrent leur formation et donnent congé au « spare » (c’est-à-dire l’avion de réserve prêt à prendre la place de tout appareil de la formation qui serait défaillant). Ils prennent un cap est vers Bruxelles, une fois Alost dépassée, la formation devient très serrée et dépasse les aéronefs plus lents, c’est-à-dire les hélicoptères et puis les SF 260 qui viennent eux-mêmes de dépasser les voilures tournantes. Les faubourgs de la ville sont à peine survolés que surgit le palais royal et puis le parlement européen, l’avenue de Tervuren et le parc de Woluwé où se produit la dislocation. Les avions de transport du 15ème wing virent sec à gauche pour rejoindre Zaventem, tandis que les autres appuient à droite pour gagner Beauvechain d’où les uns ou les autres regagneront qui Kleine-Brogel, qui Florennes, qui Bierset ou Coxyde mis à part, bien entendu, ceux qui y sont basés.

Le premier peloton de trois Agusta A109 BA du Wing Heli de Bierset.

Les appareils du Wing Heli de Liège, eux, décollent pratiquement deux heures avant le défilé aérien par patrouilles de trois ou quatre et prennent un cap sud-ouest qui les amène à survoler les beaux champs de blés dorés de la Hesbaye et Louvain-la-Neuve, à l’architecture  caractéristique, puis la butte du Lion de Waterloo, moment où le « spare » rentre à la maison. Poursuivant jusqu’à l’est de Ninove, les hélicoptères tournent à droite et se portent vers Alost. Par le travers de cette dernière et en coupant l’autoroute Bruxelles-Ostende, ils mettent résolument le cap à l’est en formation plus serrée que jamais pour prendre leur position dans le défilé et non sans se laisser dépasser par les éléments plus rapides du défilé (Alphajet, F-16 et SF 260). Le scénario est ensuite pareil à celui des autres formations, sauf que, durant de nombreuses années, les appareils de la Light Aviation effectuaient traditionnellement un passage en formation au-dessus de Malmédy avant de rentrer au bercail…

Trois Seaking et une Alouette III de la 40ème escadrille venaient de leur base de Coxyde; un participant non invité a rejoint la formation entre le dernier Seaking et l’Alouette, à savoir un busard ou peut-être l’un des faucons pèlerins nichant depuis peu dans l’une des tours de Sainte-Gudule toute proche.

Toutes les bases, toutes les escadrilles
En 2010, comme pour les défilés précédents, toutes les unités de la Composante Air de la Défense (ou de la Force Aérienne, si vous préférez) ont activement pris part à la grande parade des ailes belges.

Formation impeccable de trois Lockheed C-130H Hercules de la 20ème escadrille du 15ème wing de Melsbroek, les bons Samaritains de tant de missions humanitaires.

Cette année ont défilé successivement: six Alphajet du 1er Wing qui ont ouvert le défilé militaire en tirant les couleurs, suivis d’un box de trois F-16BM plus un F-16AM du 10ème wing de Kleine-Brogel (probablement de l’OCU ou Operational Conversion Unit F-16), d’un autre box de trois F-16AM (sans doute des 31 et 349 squadrons) plus un F-16BM décoré du 10ème wing; ensuite venaient deux box de quatre F-16AM et BM des 1ère et 350ème escadrilles du 2ème wing de Florennes sur les talons desquels se présentaient deux box de quatre SIAI Marchetti SF 260M et 260D de la 5ème escadrille du 1er wing (ex-école de pilotage élémentaire) de Beauvechain chassés par deux patrouilles de trois Agusta A109 BA des 17ème et 18ème escadrilles du Wing Heli de Bierset (qui seront définitivement basés à Beauvechain dès septembre prochain), eux-mêmes faisant place à une formation de trois Seaking (dont deux à décoration spéciale) et d’une Alouette III (ex-Heli Flight de la marine) de la 40ème escadrille de Coxyde qui céda la place à la 20ème escadrille du 15ème wing de transport de Melsbroek présentant trois C-130H Hercules, tandis que la 21ème escadrille du même wing alignait un Embraer ERJ 145 ainsi qu’un autre du type ERJ 135 et enfin la toute nouvelle acquisition, c’est-à-dire l’imposant Airbus A330-300, clôturait majestueusement le défilé aérien, qui a duré un gros quart d’heure, en montrant ostensiblement les couleurs nationales et la bannière Belgian Air Force.

L’Embraer ERJ 145 (CE-04) de la 21ème escadrille du 15ème wing de Melsbroek à la dérive frappée du nouvel emblème de la Défense.

Quelques particularités, mais pas trop
Nos aviateurs, pour le plus grand plaisir des yeux de nos concitoyens, n’avaient pas hésité à faire défiler leurs appareils chamarrés. C’est ainsi que la deuxième formation de F-16 du 10ème wing de Kleine-Brogel comportait le F-16AM du squadron 31 au décor de tigre de même que le F-16BM décoré au faucon et au damier.

Clôturant le défilé, l’Airbus A330-300 CS-TMT pris en leasing en novembre dernier et qui est opéré par des équipages de la 21ème escadrille.

Le 1er wing de Beauvechain avait constitué son premier box avec les quatre SF 260M spécialement décorés fin juin dernier pour la patrouille Hardship Red. Le Wing Heli avait eu la bonne idée, dans ses deux patrouilles de trois A109 BA, d’en montrer plusieurs en version antichar avec lance-missiles TOW ainsi qu’un autre gréé en version ambulance outre ceux en configuration observation-liaison.

Pour les monarchistes entre nous, une vue aérienne du palais royal prise du cockpit d’un C-130H lors du défilé du 21 juillet 1999.

La 40ème escadrille de Coxyde avait mis 75% de ses effectifs en l’air, dont deux Seaking à  livrée spéciale, soit le RS05 tout noir, ainsi décoré pour commémorer le  quart de siècle de présence du type au sein de l’unité (c’était en 2001), et le RS03 orné du macaron proclamant les 30 ans de service (c’était en 2006), ce qui est certes chatoyant mais aussi révélateur de l’âge vénérable du matériel qui sera bientôt remplacé par de nouveaux hélicoptères NH 90… de même que la vaillante petite Alouette III de la marine qui accuse cette année quarante ans de service !

Nostalgie 1: une formation de F-16A et B danois et portugais emmenée par un F-16AM du 10ème wing de Kleine-Brogel lors du défilé aérien de 2007.

Nous déplorons cependant, et ceci est un point de vue strictement personnel, l’absence totale dans le défilé d’appareils d’autres forces aériennes européennes, malgré que la Belgique ait pris la présidence de l’Union Européenne pour six mois à dater du 1er juillet de cette année, ce qui n’a eu que des répercussions au niveau du défilé au sol. Nous ne pouvons que nous souvenir avec beaucoup de nostalgie du splendide défilé aérien de 2007 où, sans raison particulière, de nombreux avions français (du fait des accords franco-belges en matière d’entraînement) tels qu’Alphajet de Tours et Xingu d’Avord ou encore des F-16 danois et portugais ou un AWACS de l’OTAN ainsi qu’un KDC-10 néerlandais avaient pris part, pour le plus grand plaisir du public venu en masse témoigner sa sympathie pour l’armée belge…

Nostalgie 2: un KDC-10 citerne volante du squadron 334 de la Koninklijke Luchtmacht poursuivi par trois F-16 belges qui ont l’air assoiffés en ce 21 juillet 2007.

Textes et photos : Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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