Le lundi de Pentecôte, le 13 mai 1940, un sombre chapitre s'écrivit dans l'histoire de la région de Florennes. Lors d'un bombardement sur un groupe de réfugiés sur la route de Saint-Aubin à Hemptinne, près de quarante civils furent tués en une seule journée. Nombre d'entre eux venaient des villages voisins : Crupet, Dorinne, Mailen, entre autres. Les habitants s'enfuirent, ignorant la terreur que les Allemands s'apprêtaient à infliger à leurs villages, mais de nombreux civils perdirent la vie précisément sur leur route de fuite.
Le paysage près de Saint-Aubin n'a guère changé depuis 1940. Une route relativement droite relie encore ce village à Hemptinne. À gauche et à droite de la route s'étendent champs et prairies. Quelques arbres subsistent près de la chapelle Sainte-Brigide, et non loin de là, un monument commémore le terrible bombardement aérien sur les civils en fuite. De cette position élevée, on aperçoit le village de Saint-Aubin. Il est étrange qu'une tragédie se soit déroulée ici, dans ce paysage paisible. Autrefois, il y avait davantage de haies derrière lesquelles les réfugiés pouvaient s'abriter des attaques aériennes allemandes. Des charrettes tirées par des chevaux transportant des réfugiés furent impitoyablement mitraillées le 13 mai 1940, selon des témoins, par des Stukas venant de Philippeville. Puis les bombes tombèrent. D'après les récits des réfugiés, il n'y avait aucun soldat français dans les environs ; ils ne seraient arrivés qu'après le bombardement. Le groupe attaqué était composé uniquement de femmes, d'hommes et d'enfants, tous des civils sans défense. Les pilotes de la Luftwaffe pensaient peut-être que des soldats français s'étaient mêlés aux réfugiés. Il est difficile de dire combien de temps les avions ont attaqué les réfugiés ; selon des témoins, cela a semblé une éternité. Les avions sont revenus à plusieurs reprises, laissant des cadavres et des blessés graves partout – une scène apocalyptique. On n'a jamais retrouvé aucun des réfugiés. Jusqu'à neuf personnes d'une même famille de Maillen ont été tuées.
Après l'attaque, les villages d'Hemptinne et de Saint-Aubin furent désertés, leurs habitants terrifiés par de nouveaux raids aériens. Certains passèrent la nuit dans les bois, craignant de tomber aux mains des Allemands. Le 15 mai, l'église de Saint-Aubin fut détruite lors d'un bombardement.
Le monument représente également une femme inconnue d'une soixantaine d'années. Elle fut retrouvée deux jours après le bombardement lors de travaux de réparation dans une auberge, en bordure d'une forêt adjacente. Elle repose au cimetière d'Hemptinne. Jean-François Sépulcre et Ernest Bertrand succombèrent à leurs blessures les 17 et 23 mai 1940 respectivement. Simone Patiny échappa à l'attaque contre les réfugiés. Le 14 mai, elle périt près du lieu où le lieutenant Paul Costey s'écrasa avec son Morane-Saulnier MS 406.
Les noms de 39 victimes sont inscrits sur le monument. Inauguré en 1990, il est toujours honoré tous les cinq ans. Le monument a été rénové en 2017, après que des vandales (!) eurent volé la plaque de bronze.
Source : Tragique Mai 40 à Saint-Aubin, Roland Charlier-Emile Eurgene-René Lebrun, Association des Groupements Saint-Aubin, Saint-Aubin, avril 1990





